Il est très inconfortable, dans une société comme la nôtre, pour un parent
d’aborder des questions relatives au sexe avec ses enfants. Néanmoins, cela
n’en demeure pas moins une responsabilité de tous parents pour parer à
d’éventuels risques comme la sexualité précoce, les grossesses non désirées
ainsi que les maladies sexuellement transmissibles. Mais combien de parents
bravent les tabous d’une société traditionnelle pour en parler avec leurs
progénitures. Pour en savoir davantage, la rédaction vous propose un reportage
chez les principaux concernés.
Elle a 15 ans et est lycéenne. Un air innocent marque les traits de son
visage et se repend même dans sa façon de nous répondre. A son âge, il serait
important de connaitre les tenants et les aboutissants de la vie sexuelle en
générale, mais à l’invocation du mot sexualité, Adja Astou écarquille grand les
yeux et se couvre le visage de ses deux mains, signe d’une grande pudeur et du
tabou qui entoure les questions sexuelles. Que connaît-elle de l’activité sexuelle ?
Pas grand-chose « je sais que si je me donne au
garçon, je tomberais enceinte et mes camarades pensent toutes que ce n’est pas
bien » affirme-t-elle. Les propos de cette jeune fille reflètent la grande
ignorance qui entoure la sexualité dans nos sociétés. De ce fait, il
serait donc opportun de se demander ce que les parents disent à leurs filles à
ce propos. La maman de Adja n’en parle jamais ; du moins ce sont les
propos de son aînesse « ma mère est une
femme excessivement pudique, elle n’aborde jamais ce genre de question avec
nous, pour elle c’est honteux et je la comprends. Tout ce que je sais sur la
sexualité, je l’ai appris à l’école, des propos de mes copines, des films et
des livres. Ma maman nous tiens juste à l’écart sur tout ce qui concerne ce
domaine » telle est la réponse de Adja à la question de savoir si ses parents
lui donne une éducation sexuelle.
Combien de jeunes filles sont dans le même panier qu’Adja ?
Beaucoup à en juger l’intervention des jumelles Awa et Adama Diop. Deux jeunes
de 16 ans dont les parents refusent catégoriquement d’aborder des questions
relatives à la sexualité. « mes parents
nous ont punies pendant presque 2 semaines pour avoir demandé s'il est possible de tomber
enceinte de jumeaux en couchant avec deux garçons différents, ils nous ont
traité de dévergondées et de sans gêne pour poser une telle question.
Nous avons grandi en pensant que c’était mal d’aborder ce genre de
questions avec les parents car c’est l’impression qu’ils nous ont donnés en
nous punissant » se désole Adama et sa sœur jumelle. D’où tiennent-elles des
informations relatives au sexe ? exactement comme Adja ,elles apprennent des
réseaux sociaux, des livres et de quelques connaissances. Des informations pour
le moins pas fiables si l’on se réfère à leurs façons d’aborder le sujet.
Pourtant elles n’ignorent pas les risques qu’elles encourent en ignorant la
presque totalité des choses ayant trait au sexe « je sais que cela peut être dangereux d’en connaitre qu’une
infirme partie, mais bon que faire si nos mères ne veulent surtout pas
parler de sexualité. Elles pensent qu’à la minute ou nous aurons une grande
connaissance de la sexualité, nous nous jetterons aux pieds des hommes par
curiosité et désir d’expérimenter. Donc pour éviter tout problème nous restons
loin des garçons » déclare Awa.
Il fallait bien qu’il en ai une pour équilibrer la balance. Elle s’est
Rokhaya Daba ,15 ans et collégienne. Elle déclare avoir reçue toutes les
informations nécessaires à la maîtrise de la sexualité. « Heureusement pour moi, ma mère est une femme relativement libre, moderne et
instruite. Elle ne voit pas d’inconvénient à me parler de la sexualité, ce qui
fait qu’elle m'en parle assez souvent. Je peux me référer à elle pour n’importe
quelle chose concernant la vie sexuelle.» se réjouit Rokhaya. Des mères comme
celle de Rokhaya il en faudrait davantage pour arriver à bout de certains
fléaux auxquels sont confrontés les jeunes filles, mais, hélas ce n’est pas
prêt d’arriver si l’on se réfère au point de vue de certains parents. Daba se
dit néanmoins consciente de la chance qu’elle a d’avoir une mère comme la
sienne.
Sur trois adolescentes interrogées, une seule se targue d’avoir reçu une
éducation sexuelle de ses parents. Il y a de quoi s’inquiéter dans ce
cas, si les questions tabous, la religion, les mœurs et les traditions
deviennent un frein pour les parents d’aborder les questions relatives au sexe
quand bien même leurs interventions auraient pu changer un tant soit peu la
donne. Pourquoi font-ils preuve de mutisme et de refus sur l’éducation
sexuelle ? Aux parents d’y apporter réponse.
Elle a 35 ans d’existence, au cours desquelles, maman
Aby Sow a eu trois bouts de bois de dieu de son mariage. Pour elle ses enfants
sont le modèle parfait de jeune fille dont la société a besoin. Sur quoi
fonde-t-elle ce jugement ? Eh bien simplement sur le fait que ces enfants
ignorent complètement tout de l’activité sexuelle. Pour madame Aby, c’est une
aubaine que d’avoir des enfants ignorant tout de la sexualité jusqu’au jour du
mariage « c’est le rêve de toutes les mères de
savoir leur fille pucelle et pour cela il faut éviter de leurs parler de la
sexualité. La femme est de nature curieuse, elle voudra expérimenter certaines
choses qui lui ont été dites, c’est la principale raison pour
laquelle je ne parle pas de sexe à mes filles. » Se justifie aby Sow,
avant d’ajouter que le fait de ne pas parler de sexualité avec ses filles est
un choix qu’elle a fait pour sauvegarder la pureté de celles-ci.
Les avis qui rejoignent celui de Maman aby ne manquent
pas, dans la mesure où, ses consœurs mères perçoivent l’idée de donner une
éducation sexuelle à leurs filles est complètement gênante et comme une espèce
d’approbation à se livrer à n’importe quelle tentation.
Doussou s’inscrit dans cette dynamique-là. « Je ne parle pas de sexualité avec mes filles, pas parce que j’en ignore le
fonctionnement et les conséquences mais plutôt parce que pour moi, ce serait un
moyen de les pousser à expérimenter certaines choses. Par ailleurs nous
évoluons dans une société traditionnelle qui veut qu’il ait une certaine pudeur
entre une mère et ses filles, donc parler de sexualité avec ses enfants
célibataires est une grosse entorse à la règle. »
Toutefois, pour Sokhna Fatou, ce silence qu’elle choisit par rapport à ses
filles sur l’éducation sexuelle, est un silence bruyant dans la mesure où, son
silence constitue un avertissement à ses enfants de ne surtout pas essayer de
s’adonner à certaines pratiques. Pour elle son silence est parlant dans la
mesure où il édifie ses enfants sur son refus catégorique et son opinion sur la
sexualité des jeunes « j’ai choisi de
ne pas en parler avec mes filles pour qu’elles sachent à quel point il est hors
de question pour moi qu’elles essayent de jouer avec la sexualité. Mon silence
est la garantie que quiconque d’entre elle s’’y adonne aura à faire avec moi,
je ne badine même pas avec » clarifie-t-elle.
En revanche pour d’autre comme Coumba Sy, les raisons de leur abstinence à parler de sexualité sont simplement d’ordre moral. En effet pour cette maman
de 39 ans parler de sexualité avec son enfant est une chose pour le moins
gênante, ce n’est cependant pas la volonté qui manque. Néanmoins elle qualifie
cette situation « d’honteuse » pour la mère qu’elle est, de devoir
expliquer cela à une jeune fille qui de plus, est sa fille. « J’ai dépassé l’âge de montrer un air de copine à mes filles, j’applique une
discipline rigoureuse sur elle. Un moyen pour moi de ne pas avoir à
me retrouver à parler de sexualité avec mes filles, cela m’est très
inconfortable donc je choisis de me taire en gardant toutefois une œil sur
elles. » Déclare-t-elle.
Au terme de ce reportage, les raisons ayant fait office de justification
sont relativement considérables. Il apparaît dès lors, que pour des motifs de réglementation sociale, de gêne et d’autorité à faire régner et respecter, les
mères choisissent de ne point aborder ce genre de sujet avec leurs filles.
Cependant sont-elles réellement conscientes de l’impact que cela a tant au
niveau de la psychologie des jeunes filles qu’au niveau des conséquences sur la
société sachant qu’avec l’internet, les réseaux sociaux, les séries
télévisées, les séquences sexuelles apparaissent fréquemment, et font l’objet
de débats entre adolescents.
STG :
AISSATA NDIAYE