• 30 / Apr / 2025
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Reportage sur les femmes vendeuses de journaux: Adja et Binetou , deux sœurs qui nous racontent leur quotidien

Il est exactement 15 heures 21 minutes,  soleil ardent  se place obstinément au-dessus des têtes, et un vent pour le moins houleux souffle au rond-point de Ngor. Deux femmes se faufilent entre les voitures, casquettes sur la tête, journaux à la main et dégoulinantes de sueurs, elles crient en cœur aux passagers et autres usagers de la route « journal journal. » Un travail plutôt terrible si l’on prend en compte la chaleur, les embouteillages ainsi que le mois de ramadan. Pour en savoir davantage sur leurs rythmes de travail ainsi que leurs quotidiens de vendeuses de journaux, la rédaction de Ma Féminité est allée à leur rencontre.

Elles vont et viennent, parfois courent après une voiture sur plusieurs mètres pour vendre un seul journal pour la somme de 100 francs. Néanmoins elles se disent heureuses et satisfaites de leur travail quand bien même il est fatiguant. Elles se réveillent toutes les deux à 5 heures du matin et partent s’approvisionner de leurs gagnes pain dans les différentes rédactions dont elles commercialisent les produits. Tel est le quotidien des sœurs Adja et Binetou Athie. Le rythme selon les deux braves dames est infernal mais elles n’ont pas le choix « ce travail n’est pas facile. Une fois qu’on décide de se lancer dans le commerce des quotidiens de la presse, se réveiller tôt et se coucher tard devrait être comme une seconde nature, la fatigue n’est pas un terme suffisant pour devenir notre état après une seule journée de travail » se désole Binetou Athie.

La présence de deux jeunes femmes sur les routes, poursuivant quelques fois des voitures sur des mètres devraient naturellement soulever pas mal d’interrogations dans la tête de ceux qui les voient tous les jours et dans les nôtres aussi. Dans la mesure où ce travail peut se révéler très dangereux si l’on prend en compte qu’elles font sur les bordures des routes et parfois même sur les routes. Adja et sa sœur ne sont pas ignorantes des risque que cela comporte « nous avons pleinement conscience ma sœur et moi des risques du métier. Ce n’est pas tous les jours que l’on croise une femme courir au milieu des voitures mais c’est ce qui arrive si l’on veut conserver sa dignité et régler ses problèmes soit même. Parfois les voitures roulent à vive allure sur la route parfois aussi durant les embouteillages, les voitures montent sur les trottoirs sur lesquelles nous exposons nos journaux, et c’est dangereux mais nous faisons quand même attentions à nous et veillons l’une sur l’autre comme des grandes car ce travail c’est notre gagne-pain aussi parce qu’importe le type de travail qu’on fait, tous comportent des risques » déclare Adja.

Deux jeunes dames, qui ont choisi de travailler sur les routes en tournant le dos aux réseaux sociaux, au plaisir de la jeunesse et autres loisirs c’est quand même « des valeurs honorables et une grande force combinées » selon Abdourahme Diop un usager de la route et fidèle client des sœurs Athie « si les jeunes filles de leur âge choisissait le même train de vie et imitait le modèle de bravoure des sœurs Athie, le monde ne s’en porterait que mieux » souligne-t-il. Le témoignage de ce septuagénaire a l’égard de ces jeunes dames a entrainé une autre question sur laquelle elles ont souhaité apporter une réponse : celle des tentations de la jeunesse. « Ce n’est  pas facile ce travail, c’est presque ne pas avoir de vie en dehors du boulot à cause des horaires impossible, mais on construit son avenir pendant qu’on est encore jeunes. On aurait souhaité ma sœur et moi, être comme les jeunes filles de notre âge, mais dans la vie, il faut connaitre ses priorités et faire tout pour arriver à réaliser certains de nos rêves. C’est notre devise à Binetou et à moi. Bien sur la vie devant la télé a se limer les ongles, ou devant un écran d’ordinateur pour parler des nouvelles tendances de mode et de potins dans le monde des People, c’est tentant mais on a choisi de travailler pour servir a quelques chose à cette société a nos parents et a nous-même » déclare Adja.

Dans une société ou la plupart des gens jugent et déduisent des conclusions par rapport aux apparences et aux moyens dont on dispose, vendre des journaux, pour une femme doit certainement susciter certaines réactions pour le moins désagréables à l’encontre des deux jeunes femmes surtout dans un point aussi prisé par certains «  privilégié de la société sénégalaise ». Néanmoins les sœurs Athie ont déjà une opinion bien faite la dessus « c’est vrai qu’il arrive que certaines personnes nous regardent de haut, nous narguent ouvertement quand ils sont dans leurs voitures climatisées, ou pire nous fassent comprendre qu’elles nous méprisent carrément en nous empêchant de toucher aux vitres de leurs véhicules mais bon cela ne nous découragent pas pour autant. On continue notre chemin et notre commerce tranquillement.  C’est difficile de se faire ainsi traiter par des personnes que l’on ne connait ni d’Adam ni d’Eve mais bon ainsi va la vie, certains se croiront toujours au-dessus des autres mais on fait avec quand même » se désole Adja.

La bravoure et la détermination n’est pas l’affaire d’un seul sexe et les sœurs Athie en sont la preuve vivante. Se réveiller tôt et se coucher tard  est devenu une seconde nature pour elle. Elles ne se sont pas découragées pour autant pendant ces quatre années de travail acharné. Devenir un modèle de dévotion et d’abnégation pour les jeunes de leurs âges tels est le souhait de Binetou et de  Adja Athie.

STG : AISSATA NDIAYE