Il est exactement 15 heures
21 minutes, soleil ardent se place obstinément au-dessus des têtes, et
un vent pour le moins houleux souffle au rond-point de Ngor. Deux femmes se faufilent
entre les voitures, casquettes sur la tête, journaux à la main et dégoulinantes
de sueurs, elles crient en cœur aux passagers et autres usagers de la
route « journal
journal. » Un travail plutôt terrible si l’on prend en compte la
chaleur, les embouteillages ainsi que le mois de ramadan. Pour en savoir
davantage sur leurs rythmes de travail ainsi que leurs quotidiens de vendeuses
de journaux, la rédaction de Ma Féminité est allée à leur rencontre.
Elles vont et viennent,
parfois courent après une voiture sur plusieurs mètres pour vendre un seul
journal pour la somme de 100 francs. Néanmoins elles se disent heureuses et
satisfaites de leur travail quand bien même il est fatiguant. Elles se
réveillent toutes les deux à 5 heures du matin et partent s’approvisionner de
leurs gagnes pain dans les différentes rédactions dont elles commercialisent les
produits. Tel est le quotidien des sœurs Adja et Binetou Athie. Le rythme selon
les deux braves dames est infernal mais elles n’ont pas le choix « ce travail n’est pas facile. Une fois qu’on décide
de se lancer dans le commerce des quotidiens de la presse, se réveiller tôt et
se coucher tard devrait être comme une seconde nature, la fatigue n’est pas un
terme suffisant pour devenir notre état après une seule journée de
travail » se désole Binetou Athie.
La présence de deux jeunes
femmes sur les routes, poursuivant quelques fois des voitures sur des mètres
devraient naturellement soulever pas mal d’interrogations dans la tête de ceux
qui les voient tous les jours et dans les nôtres aussi. Dans la mesure où ce
travail peut se révéler très dangereux si l’on prend en compte qu’elles font
sur les bordures des routes et parfois même sur les routes. Adja et sa sœur ne
sont pas ignorantes des risque que cela comporte « nous avons pleinement conscience ma sœur et moi des
risques du métier. Ce n’est pas tous les jours que l’on croise une femme courir
au milieu des voitures mais c’est ce qui arrive si l’on veut conserver sa
dignité et régler ses problèmes soit même. Parfois les voitures roulent à vive
allure sur la route parfois aussi durant les embouteillages, les voitures
montent sur les trottoirs sur lesquelles nous exposons nos journaux, et c’est
dangereux mais nous faisons quand même attentions à nous et veillons l’une sur
l’autre comme des grandes car ce travail c’est notre gagne-pain aussi parce
qu’importe le type de travail qu’on fait, tous comportent des risques »
déclare Adja.
Deux jeunes dames, qui ont
choisi de travailler sur les routes en tournant le dos aux réseaux sociaux, au
plaisir de la jeunesse et autres loisirs c’est quand même « des valeurs honorables et une grande force combinées »
selon Abdourahme Diop un usager de la route et fidèle client des sœurs Athie « si les jeunes filles de leur âge choisissait le
même train de vie et imitait le modèle de bravoure des sœurs Athie, le monde ne
s’en porterait que mieux » souligne-t-il. Le témoignage de ce septuagénaire
a l’égard de ces jeunes dames a entrainé une autre question sur laquelle elles
ont souhaité apporter une réponse : celle des tentations de la jeunesse. « Ce n’est pas
facile ce travail, c’est presque ne pas avoir de vie en dehors du boulot à
cause des horaires impossible, mais on construit son avenir pendant qu’on est
encore jeunes. On aurait souhaité ma sœur et moi, être comme les jeunes filles
de notre âge, mais dans la vie, il faut connaitre ses priorités et faire tout
pour arriver à réaliser certains de nos rêves. C’est notre devise à Binetou et à
moi. Bien sur la vie devant la télé a se limer les ongles, ou devant un écran
d’ordinateur pour parler des nouvelles tendances de mode et de potins dans le
monde des People, c’est tentant mais on a choisi de travailler pour servir a
quelques chose à cette société a nos parents et a nous-même »
déclare Adja.
Dans une société ou la
plupart des gens jugent et déduisent des conclusions par rapport aux apparences
et aux moyens dont on dispose, vendre des journaux, pour une femme doit
certainement susciter certaines réactions pour le moins désagréables à
l’encontre des deux jeunes femmes surtout dans un point aussi prisé par
certains « privilégié
de la société sénégalaise ». Néanmoins les sœurs Athie ont déjà
une opinion bien faite la dessus « c’est vrai qu’il arrive que certaines personnes nous regardent de haut,
nous narguent ouvertement quand ils sont dans leurs voitures climatisées, ou
pire nous fassent comprendre qu’elles nous méprisent carrément en nous empêchant
de toucher aux vitres de leurs véhicules mais bon cela ne nous découragent pas
pour autant. On continue notre chemin et notre commerce tranquillement. C’est difficile de se faire ainsi traiter par
des personnes que l’on ne connait ni d’Adam ni d’Eve mais bon ainsi va la vie,
certains se croiront toujours au-dessus des autres mais on fait avec quand même »
se désole Adja.
La bravoure et la
détermination n’est pas l’affaire d’un seul sexe et les sœurs Athie en sont la
preuve vivante. Se réveiller tôt et se coucher tard est devenu une seconde nature pour elle. Elles
ne se sont pas découragées pour autant pendant ces quatre années de travail acharné.
Devenir un modèle de dévotion et d’abnégation pour les jeunes de leurs âges
tels est le souhait de Binetou et de Adja
Athie.
STG : AISSATA
NDIAYE