« On
peut pas attraper deux lièvres à la fois » dit-on. Cela s’avère être vrai
quand on voit ces nombreuses filles qui sont obligées de mettre en pause leurs
études ou suspendre leurs temps de révision pour vaquer aux occupations
ménagères.
L’éducation des filles est l’un des meilleurs moyens de développer un pays et
de libérer la femme des chaines d’une société pleine de préjudices. D’après des
études, ce sont les filles qui brillent le plus à l’école. Mais cela ne peut
pas être toujours le cas si les filles n’arrivent plus à se concentrer comme il
le faut. Les cerveaux ont besoin de repos car cela participerait à
l’augmentation de l’intelligence et de la capacité de réflexion.
Hélas ! Toutes les filles ne bénéficient pas de ce repos ou de temps libre
qui est censé être leur échappatoire pour revisiter leurs cahiers.
En
récupérant, on peut replonger dans des pensées qui nous aident à maîtriser des
notions qui nous ont échappé. Par contre, enchaîner des activités contribue à
la fuite de mémoire.
45% des filles
de l’Afrique sont contraintes de travailler à l’école et revenir enchainer pour
faire la cuisine ou laver la vaisselle ou le linge,… CONSEQUENCES : baisse
de niveau, absences répétitives, abandon des études sont les plus fréquentes.
Nous en avons
la preuve vivante. Natoma Sonko est au lycée et doit passer son exam de
baccalauréat dans moins de deux mois. Elle partage avec nous sa stratégie pour
combiner l’école et les travaux de maison afin de s’en sortir victorieuse tout
en étalant ses difficiles conditions de vie.
« Ma mère a deux filles et trois garçons. Mais l'ainée s’est mariée et a
rejoint son mari. Ma mère se charge seulement d’ aller au marché et moi je m’occupe de la cuisine.
Cela fait maintenant plus de 5 ans que je me réveille chaque jour à 5 heures du
matin pour nettoyer la maison et laver la vaisselle avant de partir vers
l’école à 7h du matin. Parfois, il arrive que je descende à 10h ou 12h pour me
précipiter de rejoindre la demeure parce que je sais ce qui m’attend. Une fois arrivée,
je n’ai même pas le temps de respirer et
j’attaque directement la cuisine. Et c’est reparti pour des heures de travaux
non stop.
Je suis en classe d’exam et c’est très difficile pour moi. Ma mère ne veut pas
comprendre que j’ai besoin de repos et de temps de révision. C’est vrai que je
m’accroche pour ne pas lâcher prise mais je vois mes notes baisser de plus en
plus. Peut-être qu’avec un peu de chance je pourrai m’en sortir, j’en suis
juste à la dernière ligne droite. Donc je m’abstiens de dormir la nuit pour
réviser et faire quelques exercices».
Même une
personne avec un mental en fer n’arrive pas à surmonter certaines choses et en
allier beaucoup. Donc ce serait encore plus difficile pour une jeune fille qui
n’a qu’en tête le pari de réussir ses études et devenir quelqu’une. Quand les
nombreuses corvées s’y ajoutent et qu’on n’est pas forte mentalement, il y a de
fortes chances qu’on cède.
C’est ce qu’a
fait Nanette. Contrairement à Natoma, Nanette a décidé d’abandonner ses études
au détriment des travaux de la maison.
« Je n’étais pas une si brillante élève mais je me débrouillais pas mal à
l’école. Je n’ai jamais doublé de classe. Mais tout a commencé à basculer quand
ma mère est tombée malade en 2012 alors que j’étais en classe de 4ème secondaire. Elle me réveillait à 5H20 chaque
matin pour que je nettoie la maison et préparer les enfants pour qu’ils partent
à l’école avant de penser à moi. Une fois à l’école, j’arrivais plus à capter
les explications du professeur pensant à tous ceux qui m’attendent à la maison.
Quand les cours se terminaient, je me précipitais vers la maison pour préparer
les repas, faire le linge des petits, nettoyer à nouveau la maison… Dieu m’a
aidé à passer de cette classe pour la 3ème c’est-à-dire en classe de
BFEM. Mais, je n’ai pas eu plus de chance que la précédente. Mes notes ont
carrément chuté. J’avais même honte de regarder mes camarades de classe en face
et mes professeurs. Ma mère s’était rétablie de sa maladie mais ne voulais pas
reprendre ce qu’elle faisait. Alors à l’examen j’ai échoué d’office. Ce à quoi
je m’attendais car je n’étudiais plus comme avant et je n’arrivais pas à me
concentrer. Ma mère ne m’aidait pas donc j’ai décidé de mettre fin à mes études
et d’oublier mon rêve de devenir notaire ».
Des cas comme
Nanette, il en a beaucoup. Il est injuste de se tuer pendant des années pour
devenir quelqu’un et se réveiller au petit matin pour voir tout s’envoler.
Heureusement qu’il a toujours de bonnes volontés pour aider et encadrer ces
filles.
Mme Ndiaye est professeur de français au lycée . Etant passée par là, elle sait parfaitement ce que cela fait. Raison pour laquelle,
elle et capable de reconnaître les filles qui ne dorment pas assez la nuit,
fatiguée et mal concentrée et sait également comment les organiser pour leur
faire faire des séances de révision ou de rattrapage à distance.
« Adolescente,
j’ai été une mère de famille. Je faisais
tous les travaux de la maison, je m’occupais des enfants, et tout. Je dormais
moins de 5h par jour et j’avais toujours des maux de tête.
Mais, grâce à ma détermination, j’ai réussi tous mes examens. Et c’est
seulement à l’université que j’ai eu le repos et que j’ai connu le gout du
profond sommeil. Passant par cela, je sais reconnaître ceux qui sont dans la
même situation. J’ai beaucoup d’élèves qui vivent cela. Donc pour les aider
avec les études, je leur donne des documents faciles à comprendre pour résumer
les cours dont elles ont manqué ou pas compris. Pour celles qui ont des
téléphones portables, je leur donne des audio qu’elles peuvent écouter pour se
souvenir de l’ensemble des cours passés.
Je crois que les professeurs doivent les comprendre et trouver un moyen de les
aider. Je crois que c’est mieux que de les condamner par leurs mauvaises notes
ou leurs absences répétitives », a laissé entendre le professeur de
français depuis plus de 9 ans.
La scolarisation des filles commençait à
porter ses fruits mais si les parents les laissent avec tous les travaux de la maison, ils
risquent de mettre leurs avenirs en jeu.
Les préparer pour être à l’aise dans leurs ménages n’est pas un prétexte. Elles ont droit au repos pour mieux se concentrer dans leurs études et devenir de futurs leaders.