Le
lévirat est une pratique culturelle, qui consiste à donner en mariage les
veuves à l’un des frères de l’époux défunt (parfois même à ses fils aînés issus
de premiers mariages).
Certaines ethnies africaines estiment qu’une veuve ne
doit pas rester seule. C’est pourquoi elles appliquent le lévirat, une coutume
qui veut que la femme endeuillée épouse le frère de son mari.
En
effet, l’objectif premier de cette coutume est de ne pas laisser une veuve et
ses enfants sans soutien masculin au sein du foyer.
Cette tradition est répandue dans presque tous
les pays africains et parfois même permis dans certaine religion. Sur le plan
financier, la veuve conserve l’héritage de son mari au travers du remariage, ce
qui, selon certains, lui permet d’éviter le piège de la prostitution. Pour ce
qui est de la vie de famille, le nouveau mari doit prendre en charge la ou les
femmes et les enfants de son frère ou père comme s’ils étaient les siens. Il
doit donc se charger de l’alimentation, de l’éducation et de la santé pour
gommer l’absence paternelle.
Derrière
cette forme de mariage social, il y a parfois une volonté de garder possession
de la veuve. « Pour qu’une veuve reste dans la communauté de son mari, à
laquelle elle appartient, elle doit épouser le frère de son mari ». Dans
le temps, c’était aussi une façon de palier le fait qu’il y ait moins de femmes
que d’hommes. Chez les Mossis, c’est au moment du partage de l’héritage que
l’on désigne à quel homme reviendra la veuve », explique Rasmané, un
Burkinabé mossi, ethnie qui pratique encore beaucoup cette coutume. Dans
certains pays, comme la République centrafricaine, c’est une façon de ne pas
perdre la dot versée.
Mais
dans cette pratique, personne ne tient compte de l’avis de la veuve, il arrive que l’on fasse peu de cas de son
souhait. Elles subissent des pressions pour épouser le frère du défunt
même si elles font part de leur désaccord et même parfois font l’objet de menace
de mort si elles n’obtempèrent pas. Autre côté obscur de cette tradition, le
détournement vénal qu’en ont fait certains. « Avec le temps, de plus en
plus d’hommes n’acceptent cette tradition que pour prendre l’héritage de la
veuve, au détriment de ses enfants », constate Binta Sarr présidente de
l’Association pour la promotion de la femme sénégalaise (Aprofes).
Au
Kenya, des "laveurs de veuves" sont payés par la belle-famille pour
récupérer les biens dont cette dernière a hérité. Parfois sous le regard
complaisant des chefs traditionnels. Celles qui refusent d’être spoliées se
voient rejetées par le cercle communautaire et n’auront pas droit à une tombe à
leur mort.
Ce qui a participé à son recul en milieu urbain
est la peur de contracter le sida. En effet, le mari a pu succomber à cette
maladie sans que sa femme ne le sache. Contaminée, elle pourra transmettre le
virus à son nouveau partenaire. Ou alors, être elle-même victime du frère
éventuellement infecté.
Ces femmes non seulement peuvent contracter les
Virus du VIH Sida mais également peuvent être opprimé par le second mari qui
prendra une autre et délaissera celle-ci puisque ne l’ayant épousé que pour récupérer
l’héritage du défunt. En milieu rural, après le décès du mari, la
femme est automatiquement laissée sur le carreau. Les biens du défunt sont
attribués à ses parents, c’est-à-dire à ceux qui appartiennent au même clan que
le défunt. Seuls héritent le fils de la sœur du défunt, son frère ainsi que son
oncle maternel. Ni la veuve, ni ses enfants, au cas où elle en a eu avec le
défunt mari, n’ont droit à l’héritage de ce dernier.
En
effet, selon les croyances coutumières, rien ne garantit que les enfants du
mari soient effectivement les siens car elle aurait bien pu le tromper avec un
amant pendant tout ce temps. Par contre, la sœur du mari, qui dans son cas a
gardé son enfant dans son ventre pendant neuf mois, bénéficie d’une crédibilité
totale quant à l’appartenance de son enfant à la famille. C’est donc cet enfant
qui hérite des biens de son oncle. Quant à la femme et les enfants du défunt,
ils sont laissés à leur propre destin. La veuve est aussi exclue de l’héritage
tout en faisant partie de cet héritage. Après la période de veuvage où cette
dernière doit faire face à toute sorte de sévices corporels et moraux, la
belle-famille à qui elle appartient désormais se voit dans l’obligation de la
réinsérer socialement afin qu’elle ne reste pas malheureuse.
Cette
pratique dit-elle être encore de mise en ses temps modernes ?
Doit-on
toujours la pratique sous prétexte de coutume, tradition ou de religion et de
ce fait minimiser les droits de ses veuves?
C’est
autant de questions qui a toujours préoccupé les organisations de défense et de
protection des droits de la femme, et particulièrement les militantes
féministes.
Paula OGOUNWOLE